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"The River" - Bruce Springsteen

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BS1

Cet album fut un de mes premiers de Bruce Springsteen ; juste après Born In The U.S.A., et acheté le même jour que Born To Run. Certains diront que je n'ai pas découvert le Boss par la petite porte, et ils auront raison. Dans un sens, c'est pas terrible de commencer par les meilleurs albums, car forcément, quand on découvre, par la suite, le reste de la discographie, on tombe sur les vilains petits canards, les albums secondaires voire tertiaires, les rogatons, les merdes. Pour le Boss, par exemple, Tunnel Of Love (l'album a ses fans, mais je n'en ferai jamais partie, et c'est pas faute d'avoir essayé), la paire Human Touch/Lucky Town (et le live MTV UnPlugged) et, dans une moindre mesure, Magic (même remarque que pour Tunnel Of Love, mais je préfère quand même nettement Magicà ce dernier). Après, il y à le cas des deux premiers opus du Boss, que j'ai réabordé tous deux récemment, que j'adore, mais qui ne sont pas les plus, disons, accessibles de sa carrière. En tout cas, tous les fans sont unanimes : la meilleure période de la carrière du Boss, c'est la période 1975/1985, dix ans dorés comme un surfeur hawaïen, et au cours desquels Bruce a sorti cinq albums studio rigoureusement indispensables. The River, sorti en 1980, double album (toujours en CD, chaque disque durant plus de 40 minutes), fait incontestablement partie du haut du panier de cette période. Si je pense que Darkness Of The Edge Of Town (1978), sorte  de version écrémée de Born To Run (un grand album, mais tout de même surproduit) est le meilleur de Bruce, toute sa carrière confondue, The River, selon moi, vient juste derrière, avec Nebraska (1982) au même niveau que lui.

BS2

Comme je viens de le dire, ce disque est double. Il est sorti sous une belle pochette photographique noir & blanc montrant, dans une chemise de type bûcheron, et en gros plan, un Bruce Springsteen à l'expression des plus neutres. Difficile de se dire à quoi il pensait quand la photo a été prise : à l'ordre dans lequel il faudra mettre les chansons sur l'album, au futur contrôle technique de sa voiture, à son enfance, au dernier film qu'il a vu en salles, à l'endroit où il aurait rangé sa collection de timbres du Venezuela, à sa femme, je ne sais pas. Mais il y pense, en tout cas. Pas très engageant, le Brucie, sur la pochette (au verso, un rayonnage de drugstore avec images représentant des mariés et l'aigle américain), on a l'impression d'un album introspectif, intimiste, ce que sera l'acoustique Nebraska deux ans plus tard. The River est, lui, un pur disque de rock à tendance heartland, un savant mélange de genres. Certaines chansons (il y en à 20 : 11 sur le premier disque, 9 sur le second) sont du pur rock qui secoue, d'autres sont des ballades ou complaintes tristes comme un jour sans Q, certaines font rockabilly... Avec son E-Street Band désormais bien formé (Bittan, Van Zant, Clemons, Federici, Tallent, Weinberg), Bruce livre un album majeur que l'on ne se lasse pas d'écouter, un disque pouvant rivaliser avec le Double Blanc des Beatles, Physical Graffiti de Led Zeppelin, Blonde On Blonde de Bob Dylan, Songs In The Key Of Life de Stevie Wonder, Goodbye Yellow Brick Road d'Elton John et Exile On Main St. des Rolling Stones dans la catégorie des plus grands double albums de tous les temps. Probablement le dernier chef d'oeuvre double de l'histoire (certains citeraient le Mellon Collie And The Infinite Sadness des Smashing Pumpkins ou la paire Use Your Illusion des Guns'n'Roses, mais je ne suis pas d'accord, ils sont trop long et contiennent des déchets ; ils n'en demeurent pas moins époustouflants).

BS3

Que dire ? Il faut peut-être un certain temps pour totalement accrocher à ce disque ; comme tout double album, il est long et rempli de chansons, difficile de toutes les aimer au départ, et même à l'arrivée. Je n'ai jamais été plus fan que ça de la triplette Crush On You, You Can Look (But You Better Not Touch) et I Wanna Marry You sur le disque 1, par exemple, et sur le second disque, I'm A Rocker sent un petit peu son remplissage facile en 3 minutes peu originales. Mais le reste... S'ouvrant ultra efficacement sur un The Ties That Bind d'enfer et jubilatoire, l'album aligne les perles : Independence Day sur laquelle le Boss semble régler encore une fois (voir Adam Raised A Cain sur Darkness On The Edge Of Town) des comptes avec son paternel qui ne lui a pas vraiment fait apprécier son enfance ; Hungry Heart et Two Hearts, deux tubes mineurs pop enlevés ; Point Blank, sombre comme la nuit ; Drive All Night, 8 minutes crépusculaires au cours desquelles il est impossible de ne pas s'imaginer le chanteur au volant d'une voiture, la nuit, sous une route pluvieuse, seul dans sa caisse, en pleine déprime ; Stolen Car, qui aurait pu se trouver deux ans plus tard sur Nebraska ; Fade Away, touchante (je note que le second disque semble, et est, plus sombre que le premier, plus intérieur, alors que le premier disque renferme les titres les plus accessibles et pop de l'album) ; et évidemment, achevant idéalement le premier disque, The River, morceau magnifique, intense, touchant, triste, sombre et mélancolique, qui parle des souvenirs d'enfance, d'adolescence, de vie de jeune adulte d'un Américain moyen. Le couplet sur le mariage forcé (sa petite amie Mary tombe enceinte de lui, les deux jeunes gens se marient sur ordre de leurs parents pour effacer la faute, un mariage strict et sobre) est déchirant de vérité, de réalisme. La voix du Boss, l'harmonica, la guitare sèche, la dureté des paroles (pas de lyrisme, c'est du brut, la vie d'un jeune Américain désoeuvré dans un coin paumé et rigoureux où on ne fait pas ce que l'on veut), la montée en puissance de l'émotion en font un authentique chef d'oeuvre de musique américaine, et probablement la plus belle chanson de Springsteen. Bien entendu, le sommet d'un album mis à part ça franchement remarquable, essentiel et que l'on écoute toujours avec le plus grand plaisir. 

FACE A
The Ties That Bind
Sherry Darling
Jackson Cage
Two Hearts
Independence Day
FACE B
Hungry Heart
Out In The Street
Crush On You
You Can Look (But You Better Not Touch)
I Wanna Marry You
The River
FACE C
Point Blank
Cadillac Ranch
I'm A Rocker
Fade Away
Stolen Car
FACE D
Ramrod
The Price You Pay
Drive All Night
Wreck On The Highway


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