Si vous avez une bonne mémoire, vous vous souvenez alors que nous avions quitté Eddy Mitchell sur un Eddy Paris Mitchell qui sentait sacrément la merde. Un disque raté sur lequel seule Klu Klux Klan arrivait à sortir la tête de l'eau. Vous vous souvenez également que ce disque avait une face B absolument catastrophique et chargée jusqu'à la gueule d'arrangements jazzy d'un bien mauvais aloi. Eddy, du long de ses presque 60 années de carrière, n'a pas fait beaucoup de mauvais album, mais ce cru de 1986 en est clairement un. Lequel faisait d'autant plus mal au fesses car il passait après Racines, pas parfait, mais d'un très bon niveau. Il fallait donc que Schmoll retrouve ses esprits et revienne à un bon niveau. C'est ainsi qu'en 1987 arrive ce Mitchell. Lequel est sorti sous une pochette montrant Eddy disputant une partie de billard américain que l'on suppose être tendue du string. Avec autour de la table, deux mecs ayant quelques allures de mafiosi, un autre mec fringué en blanc et spectateur passionné de la partie et une gonzesse canon avec des formes bien généreuses. Le tout dans un troquet que l'on imagine sans problèmes être un peu cradingue. Bien sûr, elle est un peu caricaturale, mais depuis quand caricatural est-il automatiquement synonyme de merdique ?
Cet album, on pourrait en parler comme étant quasiment un réservoir de chansons qui ont fait date dans le répertoire Mitchellien. Il n'offre pas un, ni deux, mais trois gros succès du chanteur. À commencer par La Peau D'Une Autre. Une chanson typiquement pop 80's et qui parle d'une fille qui, la nuit, vit par procuration. Et c'est une excellente chanson. Soixante, Soixante-Deux voit Eddy replonger dans ses souvenirs d'adolescence. Comme le titre l'indique entre 1960 et 1962. En pleine guerre d'Algérie. Et, pareil, c'est franchement excellent. Soixante, soixante-deux, ça m'fait peur, soixante, soixante-deux, y avait pas qu'des rockeurs, l'Algérie c'est beau, oui mais vue du Sacré-Coeur... Rappelons qu'à l'époque, la majoritéétait fixée à 21 ans. Ce n'est qu'en 1974 qu'elle sera fixée à 18 ans. Et puis, il y a cette chanson... Pardon, cette pure merveille : M'man. Excusez-moi, mais je ne sais pas quoi vous dire de plus à son sujet. Si ce n'est que, pour ma part, je la considère comme étant la plus belle chanson d'Eddy, devant La Dernière Séance et Comme Quand J'Étais Môme. Et puis, il y a T'As Le Bonjour Du Blues qui, malgré son titre, est une pop-rock bien typée 80's, mais putainement bien balancée et c'est avec M'man ma chanson préférée de cet album. Mais, dans le cas de cette chanson, parler de succès serait aller un peu fort. On peut cependant en parler comme d'un classique.
Maintenant qu'on a fait le tour des succès et des classiques, on se dit que, finalement, le reste on s'en fout un peu et que même si c'est mauvais, ce n'est pas grave, on a déjà eu notre part de bonnes chansons. Mais, on en a d'autres à se foutre sous la dent. À l'image de Femme F.M. dans laquelle notre Schmoll national est amoureux d'une femme qui bosse à la radio. Et cette femme, comme vous vous en doutez, finalement, il n'en connaît que la voix. Cette chanson distille une ambiance que j'affectionne. On se croirait tard le soir, genre 23h et des poussières, dans un bar, en compagnie d'un mec en train de boire sa dernière. Très bonne chanson. Quelqu'un Qui M'Aime est également un très bonne chanson. Racontant une histoire d'amour virtuelle sur Minitel. T'es qu'un disque, avec toi j'prends pas d'risques... J'aime beaucoup cette chanson, même si je me serais passé des lignes de cuivres. Mais, je me dois de vous le dire, l'album n'est pas parfait. Il offre une poignée de chansons pas terribles. Comme C'Est Magique, qui épingle férocement la chirurgie esthétique. Le texte est très bon, bien mordant, mais musicalement, ça ne suit pas. Où-Est-Elle ? en revanche, est un ratage. De mon point de vue, il n'y a rien à en sauver. Vous avez remarqué comme parfois certains titres de chansons laissent entrevoir la qualité de la marchandise ? C'est exactement le cas avec Le Fils De Jerry Lee Lewis. Pareil titre appelle à une chanson très moyenne et c'en est une. Et, Le Coup De Grâce achève bien mal l'album puisqu'en elle, on tient le second ratage. Voilà ce qu'il en est pour ce Mitchell qui, s'il souffre de quatre titres faibles, en compte six qui assurent totalement. On est sur un disque d'un niveau équivalent à celui de Racines. Et même meilleur, ne serait-ce qu'à cause la présence de M'man, pure splendeur devant l'Éternel.
Face A
La Peau D'Une Autre
C'Est Magique
J'Ai Le Bonjour Du Blues
Femme F.M.
Soixante, Soixante-Deux
Face B
M'man
Où Est-Elle ?
Quelqu'un Qui M'Aime
Le Fils De Jerry Lee Lewis
Le Coup De Grâce