On ne va pas se mentir, là, c'est du lourd. Déjà parce que c'est de Bruce Springsteen qu'on va parler (enfin, reparler, parce qu'en fin d'année dernière, on en avait fait un joli petit cycle, du Boss), et ensuite parce que chez le Boss, il y à des années qui sont plus mémorables que d'autres (1975, 1980, 1984, 2001...) et que celle-ci, c'est la plus mémorable de toutes : 1978. L'album que j'aborde ici pour la very first première fois ne date pas de 1978, en fait, mais de 2010. Mais les morceaux présents dessus, tous, datent de 1978 (1977/78 en fait) et ont été composées et/ou enregistrées durant les sessions du mythique quatrième album du Boss, Darkness On The Edge Of Town, lequel est sorti en, je vous laisse deviner mais c'est facile, oui, bravo, 1978, vous êtes encore plus incollables que des timbres mal léchés. Pendant des années, il circulera des bootlegs consacrés à ces sessions mythiques, avant que le Boss ne décide, en 2010, de sortir enfin le bouzin en officiel (des vocaux et ou passages instrumentaux ont été réenregistrés en studio pour l'occasion, et on y trouve d'ailleurs la dernière participation, avant son décès en 2011, du regretté saxophoniste du E Street Band, Clarence big man Clemons, sur Save My Love, totalement réenregistré pour l'occasion). En 1978, le Boss brille définitivement de mille feux : son album Darkness On The Edge Of Town, bien que moins vendu que Born To Run (1975), est un triomphe artistique (Badlands, le morceau-titre, Prove It All Night...) et, on va le voir, les sessions ont été des plus fécondes ; sa popularité grimpe en flèche et ne retombera quasiment plus, grâce à des concerts absolument titanesques (de l'ordre de 3 heures par show, environ, parfois plus, rarement moins) qui font la fierté des bootleggers (Roxy, Winterland...). Il mérite amplement son surnom, qu'il n'a jamais vraiment aimé par ailleurs (et qui lui vient en partie du fait qu'il payait lui-même ses musiciens, mano a mano, après chaque concert).
J'ai eu l'occasion, en fin d'année dernière, d'aborder un coffret de 15 CDS, offrant cinq concerts de la tournée (dont les deux que je viens de citer), à raison de 3 CDs par live, qualité audio globalement exceptionnelle (sauf sur un concert) et contenu musical apte à faire durcir la nouille d'un foetus in utero. Dire que c'est du bootleg, pas de l'officiel donc, laisse rêveur. Si Columbia Records daignait sortir, officiellemment, ne serait-ce que le show du Roxy, dont quelques morceaux sont sur le majestueux coffret 5 vinyles (ou 3 CD) Live/1975-1985 sorti en 1986, ça ferait des heureux. Mais on rêve, parce que le seul live archival officiel du Boss àêtre sorti, ces dernières années, et ça remonte déjàà 2006, c'était un (mémorable) live à l'Hammersmith Odeon de Londres, de 1975. Bon, on revient àThe Promise ? J'en ai pas encore parlé, en fait. Ce double album archival (triple vinyle, ce qui est un peu exagéré vu la durée de l'album, moins de 90 minutes) offre donc des inédits studio des sessions 1977/78. Si on met de côté une version alternative (et grandiose) de Racing In The Street (un des meilleurs morceaux de Darkness Of The Edge Of Town que je vais désormais abréger en DOTEOT) présente en ouverture, on ne trouve aucune version démo des chansons de l'album final. Déjà, c'est cool, car ça évite les doublons. Enfin, le fan du Boss en aura, des doublons, tout de même : s'il possède le colossal coffret live de 1986 que j'ai cité plus haut, il trouvera, sur The Promise, Fire (que le Boss offrira aux Pointer Sisters), dans sa version studio. De même, le possesseur du colossal coffret 4 CD Tracks de 1998 connaît déjàRendezvous. A noter que The Promise n'offre pas la totalité des inédits des sessions de DOTEOT, car Tracks en propose quatre qui sont, ici, absents, comme Iceman et Don't Look Back. Bref, est-ce qu'on peut dire que The Promise est un peu un foutage de gueule ?
Non, mille fois non. Certes, avec seulement 87 minutes (c'est une durée approximative que je donne ; je n'ai que le vinyle), cet album est un peu court, on se demande pourquoi le Boss et/ou Columbia n'a/n'ont pas rajouté les autres inédits, ou bien des morceaux en live (sur un troisième CD, par exemple), histoire de donner un peu plus de matière. Mais tel quel, ce double album, cette compilation d'inédits, est mémorable. On y trouve la version studio de Because The Night, mythique morceau co-écrit par Patti Smith et le Boss. La version de Patti, tout le monde la connait, elle est sur son Easter de 1978. Celle du Boss, on la connaît via les concerts, mais l'enregistrement studio était uniquement dispo en bootleg. Des morceaux tels que TheBrokenhearted, Rendezvous, The Promise, City Of Night, Wrong Side Of The Street et Someday (We'll Be Together) sont de pures merveilles enlevées ou mélancoliques, c'est selon, qui n'auraient pas dépareillé sur l'album final. Come On (Let's Go Tonight) est une version embryonnaire, avec des paroles différentes (et un titre différent) de Factory, qui, elle, est sur DOTEOT. Candy's Boy, via son titre, fait penser à un autre morceau de DOTEOT, Candy's Room. On sent un concept, présent aussi bien sur l'album de 1978 que The Promise : la vie des petites gens, leur quotidien, leurs joies, leurs peines, leurs culs. Le tout, servi par une production éclatante, et des musiciens (le E Street Band de l'époque, la formation mythique) qui ne le sont pas moins. Aucun rejet à faire ici ; qu'elles soient légères ou sombres, les 22 chansons présentes ici font de The Promise un régal pour fan de Springsteen, un essentiel. Mon seul coup de gueule concerne le vinyle, le vendre en triple vinyle (mais, heureusement, à des prix globalement corrects ; un peu loins de 30 € pour trois vinyles, c'est normal), ce qui, vu la durée de l'album, est exagéré (en plus, la pochette est simple, mais épaisse, et les trois sous-pochettes sont de carton rigide, assez épais, le risque d'abimer la pochette est assez important et c'est chiant de retirer les sous-pochettes quand elles sont à ce point compressées les unes contre les autres). Mais je chipote. Fan du Boss ? Si vous ne connaissez pas encore The Promise, allez-y, c'est du bon !
FACE A
Racing In The Street ('78)
Gotta Get That Feeling
Outside Looking In
FACE B
Someday (We'll Be Together)
One Way Street
Because The Night
Wrong Side Of The Street
FACE C
The Brokenhearted
Rendezvous
Candy's Boy
FACE D
Save My Love
Ain't Good Enough For You
Fire
Spanish Eyes
FACE E
It's A Shame
Come On (Let's Go Tonight)
Talk To Me
The Little Things (My Baby Does)
FACE F
Breakaway
The Promise
City Of Night
The Way (caché)