Quand Ian Curtis s'est suicidé en 1980, son groupe, Joy Division les mal nommés, se retrouve sans chanteur, sans frontman, au moment de la sortie de leur deuxième album Closer.
En un mot comme en cent : baisés.
Casse-la Etienne (euh, je voulais dire, qu'à cela ne tienne...), le groupe va renaître de ses cendres, et devenir, avec l'arrivée de la claviériste Gillian Gilbert (le reste du groupe, soit le guitariste - et désormais, aussi, chanteur - Bernard Sumner, le bassiste Peter Hook et le batteur Stephen Morris (compagnon de Gillian Gilbert), est inchangé), un nouveau groupe : New Order. Qui se lance en 1981 avec de la new-wave minimaliste et dubbesque, qui va lentement évoluer (Low-Life, en 1985 est de la pure new-wave pop), et le groupe, cultissime (qui n'a jamais entendu Blue Monday, The Perfect Kiss, Age Of Consent, Temptation, True Faith...n'a rien entendu dans ce style musical), existe toujours. En 1989, New Order va frapper un grand coup, un coup de poker musical qui aurait pu tourner au désastre, avec Technique, et sa moche pochette représentant une statue de putto en teintes bariolées sur fond mauve atroce. Coup de poker musical ? Oui, car avant Technique, New Order (dont le précédent opus, Brotherhood, remonte alors à 1986, enfin même s'il y à eu une double compilation, Substance, en 1987) est un groupe de new-wave, comme je l'ai dit. Et un putain de bon groupe de new-wave.
Mais quand le Nouvel Ordre (mondial ?) entame l'enregistrement de ce qui sera Technique (un disque court, 39 minutes, pour 9 titres, mais parfois, on n'a pas besoin de plus), en 1988, c'est probablement avec l'intention de secouer le tapis et de proposer autre chose. Pourquoi, sinon, seraient-ils aller enregistrer l'album loin de l'Angleterre ? Technique a en effet entièrement été enregistréà Ibiza, dans les Baléares. L'île espagnole, ancien paradis des drogués et hippies (voir le film More de Schroeder, presque un documentaire sur le sujet), deviendra dans les années 90 le paradis des clubbers, des boîtes de nuits, des soirées à l'ecstasy. Avec ce cinquième album studio, New Order plonge dans l'acid-house et la dance, tout en continuant (All The Way) de faire de la new-wave. Ecoutez Fine Time, Guilty Partner, Run, c'est du Primal Scream époque Screamadelica...avec deux ans d'avance et encore plus de couilles velues posées sur la table en marbre ! Bien entendu, comme pour tous les albums (ou presque) parus sur Factory Records (voir la chronique, publiée il y à plusieurs jours à peu près, du Pills & Thrills And Bellyaches des Happy Mondays), la production sonne aujourd'hui un peu plate. Ce disque date de 1989 et ça s'entend. Un peu. Beaucoup, en fait.
A sa sortie, l'album, sous sa moche et criarde pochette, recevra, et continue d'ailleurs de recevoir, de très bonnes critiques, on en parle comme d'un des tout meilleurs albums du groupe, et c'est totalement le cas. On en parle aussi comme du disque qui a divisé les fans, entre les plus anciens, de l'époque Joy Division pour certains, qui n'ont pas aimé ce revirement dance/acid et d'autres qui, eux, ne sont pas trop post-punk et apprécieront ce changement d'horizon musical. En ce qui me concerne, l'album que je préfère du groupe reste à jamais Low-Life, vrai triomphe de new-wave pop de haute qualité, mais Technique vient juste derrière pour moi, et objectivement, oui, c'et probablement leur sommet. Rien que pour Fine Time, Vanishing Point et Run (mais tout est bon ici), cet album courageux et quelque peu précurseur est à découvrir, ou redécouvrir absolument.
Indéniablement, ce groupe a la technique. Non, pas la peine de rire...
FACE A
Fine Time
All The Way
Love Less
Round & Round
Guilty Partner
FACE B
Run
Mr. Disco
Vanishing Point
Dream Attack