Autant le dire tout de suite, ça va me soulager : pendant des années, des années, presque deux décennies en fait (oui, si longtemps que ça !), je n'aimais pas cet album. D'ailleurs, mon ancienne chronique, désormais effacée et remplacée par celle-ci, n'était pas du genre écoutez, c'est 'ach'ment bien. Je ne l'avais pas classé dans les ratages (même sans aimer, je savais pertinemment qu'il n'aurait pas été convenable de le mettre dans cette catégorie ; on parle du Zappa des années 60, tout de même), mais je le disais clairement : pour moi, Absolutely Freeétait un Zappa secondaire, vraiment je n'arrivais pas à entrer dedans, je me faisais caguer à l'écouter, mais pire qu'un boucher-charcutier se ferait caguer à un congrès de vegans. Cette seconde chronique, qui arrive bien tardivement (la précédente datait de 2009 !), est là pour rétablir l'ordre naturel des choses : j'étais vraiment bien con de penser ça au sujet de cet album de Zappa et de ses Mères de l'Invention. Leur deuxième album, d'ailleurs, sorti en 1967, un an après Freak Out ! que j'ai réabordé récemment et qui, lui, ne m'a jamais emmerdé, allez y piger quelque chose que j'ai pu, pendant des années, détester leur deuxième album tout en adorant le premier, et aussi le troisième (We're Only In It For The Money et sa pochette qui pastiche les Beatles), qui sont, pourtant, du même acabit musical. Autrement dit, vraiment pas de la pop commerciale et accessible, mais du free-jazz bien barré. Absolument libre, tout à fait.
Verso de pochette (qui est au format portrait, au passage)
Mais j'ai une excuse : j'étais putain de jeune quand j'ai découvert cet album de Zappa. Je devais avoir 17 ans. A cet âge, on se prend ça dans la face, on pleure sa mère, direct. Freak Out !, je l'ai découvert à la même époque, mais il est un peu plus accessible (la moitié de l'album, on l'a revu récemment, ce sont des chansons, certes barrées, mais à peu près conventionnelles). Absolutely Free est constitué de deux suites de morceaux, une par face, pour 13 titres en tout, et 38 minutes. La réédition CD Ryko, par laquelle j'ai découvert le disque, rajoute deux titres entre les deux faces, deux morceaux inutiles et datant des années 80, rajoutés là bien connement et qui viennent foutre en l'air la cohésion de l'ensemble (pire sera fait avec la réédition de Uncle Meat, qui propose une quarantaine de malus-tracks situés au début du second CD, juste avant la face D de l'ancien double album, par ailleurs malheureusement mal remixé). L'écoute de l'album est à faire en vinyle, d'époque (il vaut cher, très cher, très très cher, souvent, très souvent, très très souvent), ou réédité (un second disque avec des bonus-tracks, mais séparément de l'album initial, reproduit à l'identique de l'album 1967), même si la plus récente édition CD, il me semble, reproduit l'album original, sans les bonus-tracks centraux. Enfin bref. Rien que pour son concept en deux faces/deux mini-albums, le vinyle s'impose.
J'ai pas encore parlé du contenu musical, mais je ne peux pas, c'est tellement givré, tarabiscoté, que c'est impossible, et ce n'est pas de la fainéantise de ma part (enfin, si, un peu). Abolutely Free contient deux-trois des morceaux les plus connus de Zappa, à l'époque avec ses Mothers Of Invention : Call Any Vegetable, The Duke Of Prunes, Status Back Baby (qui, comme d'autres morceaux de l'album tels que Amnesia Vivace et Invocation & Ritual Dance Of The Young Pumpkin, paie son tribut aux anciens compositeurs, ici Stravinsky, aussi sur le second morceau cité, et Gustav Holst sur le dernier cité). Les deux faces, bien distinctes, sont aussi bordéliques l'une que l'autre. Plastic People commence par l'irruption du Président des USA, parodié, et qui récite, avec sa femme (à l'époque, c'est Lyndon B. Johnson et sa femme LadyBird), les premières lignes de la chanson Louie Louie, c'est apparemment tout ce qu'il peut faire. America Drinks et sa conclusion America Drinks & Goes Home parodient plusieurs styles de musique un peu comme si les musiciens étaient totalement bourrés. Les Beatles ne feront pas autre chose avec leur You Know My Name (Look Up The Number). Vous l'avez pigé, cet album est totalement dingue, son titre est parfait, et si ce n'est pas d'une folle accessiblité, c'est, avec le recul, un des essentiels de Zappa...avec, en fait, quasiment tout ce qu'il a fait de 1966 à 1980, ce qui peut faire beaucoup, mais bon, fut voir l'étendue de sa discographie, aussi.
FACE A (Absolutely Free)
Plastic People
The Duke Of Prunes
Amnesia Vivace
The Duke Regains His Chops
Call Any Vegetable
Invocation & Ritual Dance Of The Young Pumpkin
Soft-Sell Conclusion
FACE B (The M.O.I. American Pageant)
America Drinks
Status Back Baby
Uncle Bernie's Farm
Son Of Suzy Creamcheese
Brown Shoes Don't Make It
America Drinks & Goes Home