Allez, encore un peu de Queen, quelques jours (quelques mois, oui, en guise de quelques jours) après avoir reparlé de Sheer Heart Attack. Vous l'avez compris, là c'est à leur deuxième album que je m'attaque. Si tant est qu'on puisse s'attaquer à un album pareil... Considéré comme un des albums de chevet de musiciens tels que Rob Halford (chanteur de Judas Priest), Axl Rose (celui des Guns'n'Roses) et Billy Corgan (celui des Smashing Pumpkins), ce deuxième album fait suite au premier album (si, si, je vous assure) qui, sorti en 1973, s'appelait sobrement Queen. C'était un album ma foi très sympa, pas un de leurs meilleurs, pas un des pires, un honnête cru qui renferme quelques excellents moments (My Fairy King, Keep Yourself Alive, Doing All Right), d'autres un peu daubesques (Jesus, The Night Comes Down), et au final, s'il ne s'impose pas parmi les sommets de 1973 (une année assez costaude dans le genre), Queen est plutôt bon. Le successeur devra, c'est la loi, être au moins aussi bon, et de préférence meilleur. Faire mieux que le premier album ne me semblait pas une gageur impossible à accomplir. La preuve en est que ce deuxième album, baptisé Queen II pour, apparemment, faire une allusion à Led Zeppelin II, est effectivement meilleur que Queen. Sorti en mars 1974 sous une pochette iconique (un an plus tard, pour le clip de Bohemian Rhapsody, le groupe s'amusera à poser comme sur la photo, la reconstituant pour l'occasion) qui serait, pour la posture de Mercury, un hommage à Marlene Dietrich (à l'intérieur de la pochette ouvrante, une photo sur fond blanc, du même genre), Queen II ne sera pas super bien accueilli à sa sortie et reste encore aujourd'hui, avec son prédécesseur, un des moins connus du groupe. Sauf, évidemment, des fans.
Fans dont je fis partie autrefois, car comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, Queen fut mon premier amour rock de jeunesse, et même si j'ai depuis cessé d'être un Queen-head, il y à des albums d'eux que je continue d'écouter de temps en temps : ceux de la période 1974/1977 ainsi que le live de 1979 (Live Killers), précisément. Queen II a toujours été un de mes préférés, et est sorti à l'époque sous un format inhabituel : une face dite blanche, la première, et une face noire (forcément, l'autre). Le disque était uniformément noir, mais ce sont les labels qui, selon la face, étaient soit blanc, soit noir. Pourtant, aucun concept ici, juste une série de chansons qui, toutes (ou presque ; je ne suis pas convainci qu'il fallait garder Funny How Love Is sur le disque), tuent leur arrière-grand-mère avec un couteau de boucher de seconde main. La face A, la face blanche, s'ouvre sur le court Procession, instrumental grandiloquent (ce jeu de guitare de Brian May, qui, grâce à la magie du studio et à l'empilage de couches, fait sonner son instrument comme un orgue ; aucun synthétiseur, nulle part, ce qui est fièrement indiqué sur la pochette), avant de céder la place à un Father To Son assez proche du heavy rock. White Queen (As It Began) est sans aucun doute mon préféré de l'album, une splendeur sur laquelle Mercury est en état de grâce. Brian May et Roger Taylor (batterie) ont chacun droit à leur moment à eux ensuite : Some Day One Day pour May (la première chanson qu'il chante sur un disque du groupe, très belle, très douce) et The Loser In The End pour Taylor et sa voix hargneuse, chanson assez heavy.
La face noire, elle, s'ouvre sur ce que l'on sera bien obligé d'appeler une suite de morceaux. En effet, les quatre premiers morceaux de cette seconde face s'enchaînent sans pause. On a d'abord Ogre Battle, très furax, très heavy, un des morceaux (avec Stone Cold Crazy de l'album suivant) qui semble avoir influencé le futur thrash metal (Metallica reprendra Stone Cold Crazy, d'ailleurs, qui ne semblera pas plus violent dans leur version que dans celle de Queen), très efficace. The Fairy Feller's Master-Stroke, qui tire son nom à rallonge électrique d'un tableau de Richard Dadd (Mercury s'est inspiré de ce tableau quelque peu étrange pour les paroles, imprégnées de fantasy), suit, et on ne saurait trouver un morceau plus différent. Nevermore, sublime ballade au piano, assez courte, suit, avant de laisser la place àThe March Of The Black Queen (on le voit, chaque face possède une Reine correspondante à sa couleur), morceau démentiel qui semble avoir semé la voie pour le futur Bohemian Rhapsody. Indescriptible (le passage musclé avec les interventions vocales de Taylor, mamma mia...). Funny How Love Is, un peu cyclique, me semble être le maillon faible de l'album, qui s'achève sur Seven Seas Of Rhye, gros tube de 1974 que le groupe avait déjà proposé sur l'album précédent dans une courte version instrumentale. Je n'ai jamais été plus fan que ça de cette chanson qui, ceci dit, est loin d'être ratée. Elle achève très bien un second album radicalement meilleur que le précédent, et un des meilleurs du groupe. Tout simplement essentiel à toute personne aimant Queen et le glam-rock un peu tiraillé vers le hard-rock. Toute une époque.
FACE A(WHITE SIDE)
Procession
Father To Son
White Queen (As It Began)
Some Day One Day
The Loser In The End
FACE B (BLACK SIDE)
Ogre Battle
The Fairy Feller Master-Stroke
Nevermore
The March Of The Black Queen
Funny How Love Is
Seven Seas Of Rhye