Voilà un cryptonyme (Stone Temple Pilots), voire un acronyme (STP pour les intimes…) que l’on avait oblitéré, presque sciemment phagocyté… Bon gré, mal gré, Stone Temple Pilots sera affilié au grunge, une mouvance avec laquelle le groupe partage certaines accointances. Pourtant, le quatuor (Scott Weiland, Dean DeLeo, Robert DeLeo et Eric Kretz) ne provient pas de la scène de Seattle. Scott Weiland et ses sectateurs sont originaires de San Diego, en Californie. Certes, le chanteur (Scott Weiland) n’a jamais caché sa dilection pour Nirvana, un groupe qu’il révère et sacralise. A contrario, Scott Weiland a toujours vouéà l’opprobre et aux gémonies Pearl Jam, un autre groupe grunge qu’il juge faraud et prétentiard. En vérité, Stone Temple Pilots est davantage connu pour les facéties et les extravagances de son leader (cure de désintoxication et plusieurs séjours carcéraux, notamment) que pour ses qualités musicales (pourtant bien réelles). L’anamnèse des troubles psychopathologiques de Scott Weiland conclut à une bipolarité, nimbée à la fois par de la contrition et de la désinvolture.
Au fil du temps, les élucubrations du chanteur finissent par désarçonner les frères DeLeo. A maintes reprises, Stone Temple Pilots se liquéfie, puis se réconcilie. Toutefois, la scission reste prédominante. Paradoxalement, leur premier album, Core (1992), s’écoule à plusieurs millions d’exemplaires, nonobstant toute une salve de saillies et d’acrimonies. La presse spécialisée ne manque pas de semoncer un essai qui s’approxime à une copie éhontée de Ten (1991), le premier album de Pearl Jam. Ces admonestations déclenchent - manu militari - les furibonderies de Scott Weiland. Le leader jupitérien n’apprécie guère la métaphore. Le prochain disque de Stone Temple Pilots se doit d’emprunter d’autres mélopées chatoyantes. Ce sera Purple, sorti en 1994. La pochette du disque est plutôt psychédélique et arbore une sorte de nourrisson qui voyage sur un dragon. Quelle est la signification de cette oriflamme fuligineuse et absconse ? En l’état, difficile de répondre… Toujours est-il que Purple reste le disque préféré des thuriféraires, parfois àéquité avec Tiny Music… (1996).
A l’époque, Stone Temple Pilots est au faîte de sa gloire et de sa quintessence. Le groupe toise arrogamment les firmaments des charts. Scott Weiland et ses ouailles réfutent toujours catégoriquement l’étiquette « grunge ». Stone Temple Pilots préfère stipuler David Bowie et les Beatles parmi leurs augustes références. Et c’est justement sur ce chemin (escarpé ?) que s’immisce Purple. En outre, ce disque de rock alternatif (grunge ?) propose une durée idoine, à peine 47 minutes et onze morceaux. Que l’on aime ou que l’on déteste Stone Temple Pilots, le groupe ravive régulièrement la polémique, tout du moins durant la décennie 1990. Alors que Scott Weiland continue de multiplier les déboires (principalement conjugaux), les frères DeLeo s’affairent doctement au travail.
Par ailleurs, ce sont les deux frangins qui ont composé, besogné, arraisonné, produit et griffonné la grande majorité de l’album Purple. Entre deux escapades carcérales, Scott Weiland vient s’ajouter aux martialités. Dès le préambule, les inimitiés sont lancées.
Purple propose un curieux amalgame entre rock alternatif et pop rock. Les stridulations de Core sont abandonnées au profit de mélodies raffinées. Meatplow, Vasoline et Lounge Fly sont d’excellentes entrées en matière. Avec de telles arguties dans sa besace, Stone Temple Pilots n’a rien à envier à Pearl Jam, Soundgarden et autres Nirvana. Ce n’est pas aléatoire si le single Big Empty sera utilisé pour la bande originale du film The Crow. Scott Weiland continue lui aussi d’affirmer (et d’affiner) son obédience pour la pop rock britannique. Preuve en est avec Interstate Love Song et Still Remains, qui sont – eux aussi – de sublimes intermèdes. En revanche, la seconde segmentation du disque est un peu moins éloquente et vise avant tout l’efficience.
Certes, Silvergun Superman et Unglued raviront sans doute vos esgourdes. On nage davantage dans un rock affermi, presque hégémonique, et qui n’est pas sans itérer certaines dissonances de Nirvana. Par exemple, sur la forme, Army Ants s’apparente à un resucé de Smells Like Teen Spirit (album Nevermind), toutefois avec un peu moins de sagacité et de fulgurance. Néanmoins, il faudrait faire la fine bouche pour ne pas discerner les attributs de ce disque souvent flamboyant, sans doute le ou l’un des plus éloquents de Stone Temple Pilots… Même si personnellement, j’ai une préférence pour Tiny Music… Indiscutablement, Stone Temple Pilots possède un sacré potentiel. Hélas, le groupe sera victime (bis repetita) des incartades de son chanteur. Après Tiny Music, la suite sera beaucoup moins captivante…
Alice In Oliver
Chronique complémentaire de ClashDoherty :
Je ne connaissais pas les Stone Temple Pilots avant d'entendre, un jour, Vasoline. Puis, cherchant sur quel album se trouvait cette chanson, j'ai découvert qu'elle se trouvait sur un album sorti en 1994, du nom de Purple, le deuxième album d'un groupe américain de grunge/rock alternatif nommé Stone Temple Pilots. Tout le monde appelle ce disque Purple, d'ailleurs, mais il faut savoir que nulle part, nulle part, vous ne trouverez le titre de l'album, aussi bien sur la pochette, dans le livret, sur la tranche du boîtier CD, sur le disque lui-même, au dos du boîtier, rien, nulle part. Ah si, sur le recto de pochette (une illustration nipponnisante représentant un bébé souriant chevauchant un dragon asiatique, on distingue des adultes dans l'arrière-plan), outre le nom du groupe, on a un idéogramme chinois (ou japonais ?) qui signifierait 'pourpre'. Soit le titre de l'album en idéogramme. L'album dure 47 minutes, pour 11 titres, et le dernier titre, long de 8 minutes, inclut un morceau caché très drôle baptiséThe Second Album, sur lequel on entend un des membres du groupe (pas le chanteur principal, Scott Weiland) chanter, à la manière d'un crooner-de-ces-dames, une chanson bien rigolote aux paroles bien crétines, parodie de Johnny Mathis. C'est rigolo, mais assez con et inutile, l'album serait sans aucun doute encore meilleur sans ce ghost track bien crétin et à côté de la plaque. Bon, sinon, le groupe, c'est Scott Weiland (chant, guitare), Robert Deleo (basse, guitare), Dean Deleo (guitares) et Eric Kretz (batterie).
Comme Alice In Oliver l'a dit plus haut, Purple est loin d'être le moins bon album des Pilotes du Temple de Pierre (vous parlez d'un nom de groupe à la con), N°4 et Shangri-La-Dee-Daétant pour le moins ratés (surtout le dernier cité, car N°4, ça peut encore aller, en fait). Pour ma part, je pense clairement qu'il s'agit du meilleur opus du groupe de Weiland (groupe dont je ne suis pas plus fan que ça, c'est le moins qu'on puisse dire, et que j'écoute rarement), il offre en tout cas plein de chansons vraiment bluffantes, essentiellement placées en tête d'album : Meatplow, Vasoline, Lounge Fly, Interstate Love Song, Still Remains, cinq chansons (soit presque la moitié de Purple) consécutives qui foutent bien la patate et assurent mortellement. C'est dommage que la suite de l'album n'est pas du même niveau d'exceptionnelle excellence (Pretty Penny, Silvergun Superman sont bien, mais je ne suis pas convaincu par Big Empty, Unglued et Army Ants ; heureusement, Kitchenware & Candybars, le dernier titre, remet un peu le niveau à la hausse avant le morceau caché qui est, je le redis, débile comme une réflexion après-donut d'Homer Simpson). L'album n'est cependant pas très long (47 minutes douche comprise, ça aurait pu être pire, ça aurait pu être 60 minutes, après tout), et offre plus de bonnes chansons que de mauvaises (disons plutôt : moyennes), ce n'est donc pas grave du tout.
Si vous aimez le rock teigneux des années 90, limite grunge ici (d'où le tag et la catégorie, mais je peux comprendre que ça soit polémique), alors Purple est un album àécouter, vraiment. Sa légion de grandes chansons, sa production (de Brendan O'Brien, producteur de Pearl Jam et d'au moins deux Rage Against The Machine) est parfaite, l'interprétation est efficace... A noter qu'au dos du boîtier, un joli et gros gâteau (une photo) avec la mention 12 gracious melodies est visible (le fait qu'il y ait le chiffre 12 signifie fatalement que le morceau caché est officiellement crédité, mais, en fait, il n'y à pas 12, mais 11 chansons), mais pas la liste des morceaux (il faut ouvrir le livret, qui contient les paroles, pour ça) !
Meatplow
Vasoline
Lounge Fly
Interstate Love Song
Still Remains
Pretty Penny
Silvergun Superman
Big Empty
Unglued
Army Ants
Kitchenware & Candybars
(The Second Album)